Le feu de décembre

Le temps me poursuit et il est plus rapide que moi. Autant dire que le mien s’est arrêté au temps des neiges. Ce jour de décembre où mon regard s’est perdu dans les flammes qui réchauffaient mon visage, qui réveillaient mon cœur de glace. Danse du feu, danse macabre, funeste instant où j’ai réalisé l’effroyable paradoxe de t’aimer et de te perdre à la fois. Chacun son chemin, le même support, le même cœur à l’ouvrage, mais deux villes, deux espaces, deux mondes éloignés l’un de l’autre. Une toile, fil invisible qui depuis me relie à toi, à ton talent, à nos similarités, à ta plume. Quelques souvenirs, marqués depuis cette date au fer rouge en moi, et qui se réveillent lorsque je croise celui qui te ressemble au détour d’une avenue.
Le temps est plus fort que moi, je poursuis un rêve, une utopie, et me perds dans la spirale de la réalité, cette spirale qui voudrait m’empêcher d’ouvrir mes yeux, mon bras, mon âme, je me bats pour faire survivre ma plume dans un monde qui voudrait l’empêcher de vivre, pour ce double-ego à tendance schizophrène.
Et parallèlement, j’assiste depuis l’autre côté de la Terre à ton lent déclin, je vois ta réalité étouffer la part de toi que j’ai réveillée avec patience il y a plusieurs années. Tu vis, tu aimes, le temps t’a rattrapé, quel gâchis. Ne pas vouer à ton talent la patience qu’il mérite.
Je suis sous les braises du feu consumé de décembre. Comme elles, je suis endormie. Je vis, j’aime, dans une semi-somnolence qu’aucune passion ne réveille. Seuls les mots ont le pouvoir de me réveiller. Les miens. Les tiens. Écris. Réveille-moi.
 
© Copyright Laetitia Carboni 2014 La cerise sur l'éclat de carbone.