L'âme de l'écrivain.

Face à mon écran je suis soudain surprise par une émotion qui me submerge. Mes yeux s’humidifient de larmes que je me dépêche de ravaler. Je comprends alors : je suis émue. Devant moi, il y a des mots dont la puissance me ravage.
J’ai toujours eu du mal à comprendre les autres, à m’adapter aux situations qui à première vue paraissent ordinaires. Mes émotions habituelles viennent surtout d’une incompréhension qui s’ajoute aux signaux que mon corps m’envoie pour me faire comprendre que je suis triste, heureuse, amoureuse, en colère, etc. Mais ici, je me retrouve en terrain connu. Les mots. Couchés sur du papier ou tapés sur un clavier, lorsque leur agencement est juste et que leur musique est belle, ils pénètrent à l’intérieur de mon âme.
Ceux-ci m’appellent, me prient de jouer avec eux, virevoltent autour de mon cœur. Mais alors soudainement les doutes m’assaillent. Ces mots ont été écrits par quelqu’un. Un de ces humains que j’ai tant de mal à comprendre. Est-ce que cela veut dire que cet humain est comme moi ? Il est difficile de ne pas distinguer les nombreuses similitudes dans nos écrits. A travers ses mots, je distingue son âme. Mais je ne le sais que trop bien, l’âme de l’écrivain est cachée derrière sa plume. Face à lui ne verrais-je qu’une façade aussi incompréhensible que les autres.
J’en arrive à cette conclusion : l’art offre une chance inouïe que même l’amour ne permet que très difficilement : pénétrer l’âme de l’autre.
 
© Copyright Laetitia Carboni 2014 La cerise sur l'éclat de carbone.