Mes
yeux se perdent dans les spirales bleues de la fumée de ma cigarette, mon
souffle se fait court, saccadé, mon ventre se crispe, et bientôt je sens sur
mes lèvres le goût salé des larmes qui perlent sur mon visage.
Oscar
Wilde a dit : « A celui qui veut faire de la vie un art, le cerveau
tient lieu de cœur. »
À
dire vrai, pour ma part, ce serait plutôt le cœur qui tient lieu de cerveau.
Réciproquement, je devrais vouloir faire de l’art une vie. Ma vie. Il est
vrai que j’ai l’amour de l’art, peut-être d’avantage que l’art de l’amour.
Pourtant, ce n’est pas faute d’aimer. C’est bien cela mon problème : j’aime
trop. J’aime à donner, à tout donner, jusqu’à mon âme. Ma solitude n’est qu’un
brouillon, une ébauche d’une vie que je n’aspire qu’à partager. J’ai trop d’énergie,
trop à donner, j’en perds la tête, la mémoire, et paradoxalement je suis emplie
d’un trop-plein de lucidité, les mots m’échappent, vite, les poser avant qu’ils
ne s’envolent, un papier, un crayon, et voilà, mon âme se perd dans les
spirales de ma plume, mon souffle se fait court, saccadé, et ainsi, mes délires
recommencent.