Des maux choisir mes mots.

Sais-tu depuis combien de temps je n’avais plus pleuré à m’en détruire les yeux, depuis combien de temps je n’avais pas eu l’audace d’être un instant déraisonnable, depuis combien de temps je n’avais pas laissé mon corps dominer ma pudeur, mon cœur dominer ma raison ?

Flashes. Ma mémoire est teintée d’instants pris sur le vif, des photographies d’émotions, qu’elles seules peuvent susciter. Les connexions établies par mes neurones sont intemporelles, elles n’ont pas d’âge, seule la puissance de l’instant détermine la force du souvenir. Ce qui est fascinant, c’est que chaque activation déclenche une copie imparfaite, disproportionnée, de l’émotion ressentie lors de l’événement rappelé.

Comment pourrais-je t’en vouloir ? Tu m’as réveillée. Réveillé une âme endormie par un quotidien terne et monotone. À vrai dire, c’est exactement ce que je cherchais. Ce qui a de premier abord suscité mon intérêt. Ton instabilité a été le moteur de notre histoire. À l’image d’un électron libre, elle nous a attirés et repoussés l’un et l’autre à tour de rôle. Tout est implicite, tout est explicable. Mon âme, plus torturée encore que la tienne, a disséqué chaque parcelle de toi, de moi, de nous. L’inspiration m’habite de manière constante. Je n’ai jamais autant écrit que depuis notre rencontre, depuis notre rupture. C’est douloureux, et tellement bon à la fois. La question n’est même plus de savoir si j’ai aimé un homme ou simplement l’image que je m’en faisais. Ce que j’ai aimé, c’est me sentir vivante. Ce sentiment qui persiste encore aujourd’hui. Ce que j’ai aimé, c’est accepter de perdre le contrôle. Être jeune. Puissante. En vie. Ivre d’amour, ivre de bonheur, de tristesse, de rage. Ivre. La tête qui tourne, les pieds qui décollent.

C’est maintenant que tout commence.
 
© Copyright Laetitia Carboni 2014 La cerise sur l'éclat de carbone.